Wang Keping à l'œuvre

Le sculpteur contemporain Wang Keping est invité à investir le jardin de sculptures pour en faire son atelier du mardi 3 mai au dimanche 5 juin.

En partenariat avec la Galerie Nathalie Obadia.

L’artiste travaille en direct sous les yeux du public sur quatre sculptures monumentales en cours d’élaboration, dans le vaste espace du sous-bois. En taille directe de troncs d’arbres entiers, il fait surgir des formes sensuelles, pleines d’émotion et de poésie. Cette invitation est une occasion unique de découvrir l’artiste au travail et de voir l’œuvre en cours de création. La sculpture achevée, L’Amour des Forêts, est à découvrir dans le hall du musée.

Avec Rodin

« Le premier sculpteur que j'ai connu était Rodin »

Wang Keping naît près de Pékin en 1949, dans une famille lettrée et cultivée. Voyant ses aspirations artistiques entravées par la censure politique, il participe en 1979 à la fondation du groupe d’avant-garde chinois, le « mouvement des Etoiles », dont les premières manifestations sont réprimées. C’est en France, où il arrive en 1984, qu’il poursuit l’élaboration d’un langage sculptural très personnel, synthèse d’une habileté manuelle revendiquée, d’une tradition chinoise maîtrisée et d’une expressivité très contemporaine.

Pratiquant le modelage de la terre ou la taille directe du bois, Auguste Rodin et Wang Keping usent chacun de matériaux et de moyens très différents. Pourtant, leur conviction commune que la nature et la vie sont les sources véritables de toute inspiration, leur donne à tous les deux cette faculté rare de voir et d’entendre ce qu’elles leur offrent spontanément.

Rodin aimait recevoir d’autres artistes et échanger avec eux… Depuis sa création, le musée a repris cette tradition d’inviter des sculpteurs contemporains à travailler et exposer en ses murs.

« Le bois me chuchote son secret »

 Avec une grande économie de moyens, Wang Keping travaille le bois, voire l’arbre lui-même ; ses œuvres montrent tout son intérêt pour la fertilité de la matière et, comme en écho, pour la fécondité du corps féminin. Sa sculpture figurative, loin d’être une simple imitation du réel, donne toute sa place à la puissance évocatrice et signifiante de formes simples, primitives et universelles. Pour exprimer la beauté, l’amour et l’érotisme essentiel des corps, le sculpteur privilégie des lignes et des volumes épurés, débarrassés de tout détail anecdotique.

Ces sculptures naissent d’un protocole immuable qui commence par la quête, dans les forêts voisines, de l’arbre dont les caractéristiques naturelles (branches, nœuds, accidents…) portent en germe la forme à venir. Une fois le tronc arrivé dans l’atelier, commence le corps à corps avec la matière : enlever l’écorce, dégrossir le motif à la tronçonneuse en suivant le bois et faire éclore la forme juste avec des outils de plus en plus fins. Le séchage en plein air laisse la nature reprendre la main, créer des fentes aléatoires que le sculpteur respecte à son tour. Le long travail de finition, fait de ponçages et de brûlages successifs, donne aux sculptures une peau parfaitement lisse, douce et d’une grande sensualité.

C’est à ce travail de finition que Wang Keping nous invite à assister. Arbres parmi les arbres, quatre grandes sculptures, taillées d’un seul bloc et conçues en étroite collaboration avec la nature elle-même, témoignent de la poésie et de la puissance évocatrice des œuvres de l’artiste. Assemblées et posées à même le sol par la volonté de l’artiste, ces quatre figures monumentales se répondent. Leur surface, calcinée et poncée, prend peu à peu une texture soyeuse et brillante, d’un noir profond. Sous l’effet de la lumière, cette patine magnifie la courbe de chaque profil et les motifs dessinés par le fil et les cernes du bois.